Le président Gbagbo considère qu’il ne peut y avoir de réconciliation sans rétablissement de la vérité des faits qui ont jalonné l’histoire récente du pays. Notamment la question électorale et celle des droits de l’homme, notamment la fameuse tuerie des femmes d’Abobo.
Une ambiance «émouvante, chaleureuse et studieuse». C’est ainsi qu’un témoin qualifie la rencontre entre le président Laurent Gbagbo et quatre de ses avocats – Lucie Bourthoumieux, Marcel Ceccaldi, Jacques Vergès et Roland Dumas – samedi dernier à Korhogo. Les deux derniers, que Gbagbo connaît personnellement depuis de nombreuses années, n’avaient pas pu le rencontrer depuis le 11 avril «maudit».
Gbagbo va bien, «il est plus déterminé que jamais», nous confie notre source. Il a profité de l’occasion pour exprimer son point de vue sur un certain nombre de sujets-clés. Notamment les polémiques sur ses conditions d’incarcération. A ses yeux, explique notre source, «le problème ce ne sont pas les conditions de détention, mais le fait même de sa détention». Politique jusqu’au bout des doigts, Gbagbo refuse que le registre du compassionnel serve à masquer le débat politique de fond qui conditionne, à ses yeux, tout processus de réconciliation sérieux. Selon lui, «la Côte d’Ivoire, l’Afrique, le monde entier, doivent connaître la vérité».
Le temps médiatique étant passé, c’est désormais le temps de la vérité historique. Il faut donc débattre à nouveau sur la question de fond : qui a gagné les élections ? «Ce n’est pas tellement pour reprendre le pouvoir demain, mais il s’agit de la vérité qu’on doit à un peuple souverain», explicite notre source.
C’est parce que Gbagbo est prioritairement préoccupé par l’éclatement de la vérité non seulement sur le processus électoral, mais sur la question des droits de l’homme, qu’il a instruit ses avocats de demander une Commission d’enquête internationale indépendante sur la fameuse tuerie des femmes d’Abobo. L’enquête s’annonce d’ores et déjà complexe, dans la mesure où les actuelles autorités ont enterré les femmes, sans autopsie préalable, en catimini, comme si elles avaient peur de leurs propres «arguments » contre un adversaire auquel elles promettent pourtant le TPI.
C’est cette tuerie non élucidée d’Abobo qui a déclenché le vote de la résolution 1975 et ce qu’il considère comme «la guerre de la France contre la Côte d’Ivoire». Une guerre non déclarée, en contradiction avec le droit de la guerre, alors que les Forces de défense et de sécurité ivoiriennes avaient le dessus sur les forces opposées. Sans aucun doute, Koné Katinan, le porte-parole et le représentant du président Gbagbo, en dira plus dans les prochains jours sur la stratégie de combat de son «patron», focalisé sur le sens et les enjeux historiques des événements douloureux au cours desquels, il en est persuadé, la Nation ivoirienne, même momentanément vaincue, se forge.
Philippe Brou
Source: Le Nouveau Courrier
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