En Côte d’Ivoire, les armes se sont presque tus. Le nouveau régime en place essaie tant bien que mal de montrer le visage d’un pays qui renoue avec la normalité.
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Alassane Ouattara et son équipe, ont pour ce faire, entamé une série de manœuvres qui en dit long sur leur désir de bonne faire figure: négociations avec le FPI; installation de la Commission dialogue vérité et réconciliation (CDVR); réinstallation des corps habillés dans les zones CNO; visite officielle de Ouattara dans l’ouest du pays, annoncée puis reportée sine die; invite aux exilés du Ghana à rentrer au pays; élections législatives programmées; etc.
Tout ceci, bien entendu, dans un abattage médiatique qui frise une propagande mal ficelée. On se doute bien que les voyages intempestifs d’Alassane Ouattara, ces derniers temps, y sont pour quelque chose.
Les rappels à l’ordre et les recommandations de ses alliés français et des différents bailleurs de fonds sollicités justifient sans doute cette soudaine accélération de ces actions politiques initiées dans une Côte d’Ivoire en pleine crise. Crise dont les solutions sont à chercher bien au-delà de ces coups d’éclats factices.
Pour les nombreux ivoiriens et observateurs ces actions tape-à-l’œil du gouvernement Ouattara, indiquent que la crise ivoirienne, loin d’être finie, vient au contraire de franchir une nouvelle étape: celle de la partie civile du conflit qui fut malheureusement délaissées au profit des armes à feux.
S’il est vrai que chaque acteur souhaite désormais une résolution pacifique de la crise, force est de reconnaître que celle-ci passe nécessairement par une solution politique. Dans cette perspective, des questions de fond méritent d’être posées et traitées. Des questions sans lesquelles, les divisions entre les ivoiriens continueront de s’agrandir.
Cependant, face au refus de Ouattara et de ses alliés de franchir le pas, à savoir libérer les prisonniers politiques et leurs appréhensions à s’inscrire pleinement dans le processus de résolution de la crise, comment envisager les conséquences à venir, pour cette Côte d’Ivoire déjà meurtrie? A la lumière des développements passés et récents de l’actualité, tentons ensemble d’y apporter des réponses.
Sept mois après la prise du pouvoir par Ouattara, la Côte d’Ivoire toujours endolorie peine à panser ses plaies. Même si les populations semblent vaquer à leurs occupations et que la vie semble avoir repris, c’est bien plus par instinct de survie et par désir de quiétude, qu’une attitude de satisfaction de l’état actuel des choses. Ce brave peuple ivoirien en apparence résigné, n’a pas dit son dernier mot. Habitué à exprimer haut et fort sa soif de liberté et d’indépendance. Le moment venu, croyez-le, il s’exprimera et ce sera l’expression de ses espérances les plus profondes. En attendant ce grand jour, place est laissée aux politiciens ivoiriens, pour sortir la Côte d’Ivoire de l’ornière. Les armes ayant finalement montré leurs limites.
Pour mémoire, il importe de le rappeler : Après avoir cassé les prisons, déversés des hordes d’assassins et de voyous dans le pays, formé un gouvernement et une administration tribaliste et régionaliste, emprisonné, persécuté et contraint à l’exil ses opposants, désorganisé l’appareil judiciaire, la police et la gendarmerie, violé sans vergogne la Constitution ivoirienne, méprisé les cris d’indignation des ivoiriens face à sa justice des vainqueurs, Ouattara est aujourd’hui rattrapé, lui et ses acolytes par ses actes. La Côte d’Ivoire plus que jamais, a besoin de la restauration de la démocratie et de l’Etat de droit. Au risque, si elle ne l’est déjà, de se voir hisser au rang des républiques bananières. La tâche n’est pas aisée. Et chacun a l’occasion de le constater : Ouattara n’a pas la capacité de réinstaurer la sécurité des personnes et des biens, il n’en n’a surtout pas pour rassembler les ivoiriens. Après avoir reçu de ses parrains, le pouvoir d’Etat sur un plateau d’argent, l’homme fait montre de beaucoup d’insuffisances, notamment dans le domaine politique. Faut-il le rappeler ? La crise que traverse la Côte d’Ivoire est avant tout une crise politique, c’est-à-dire une crise qui a trait au collectif, à une somme d’individualités donc en rapport avec les choix et les décisions du peuple. Il appartient donc au peuple, à travers ceux auxquels il s’identifie, de régler ce problème. Ce n’est donc pas l’usage démesuré et injustifié des armes qui règlera cette situation. Mais plutôt un dialogue franc et humain. C’est ce vœu qu’a formulé Laurent Gbagbo, les instants qui ont suivi son arrestation : « Je souhaite qu’on arrête les armes et qu’on rentre dans la partie civile de la crise et qu’on conclue rapidement pour que le pays reprenne ». Mais Ouattara, obnubilé par la joie de pouvoir enfin s’asseoir dans le fauteuil présidentiel, avait fait la sourde oreille. Conséquence: le nombre de victimes n’a cessé de croître après l’offensive de ses alliés pour chasser du pouvoir le président démocratiquement élu. Aujourd’hui, Alassane Ouattara, confronté à la dure réalité de l’exercice du pouvoir, est obligé de faire machine arrière et de retourner à la case départ: celle des négociations avec l’opposition significative. La priorité doit être ici, nous le soulignons, l’intérêt supérieur de la Côte d’ Ivoire, au-delà des petits calculs politiciens.
Vu l’ampleur et la gravité de la situation, la tâche s’annonce ardue. Cela nécessite de chaque acteur de cette crise, de la sincérité, du courage politique, un sens élevé de la responsabilité, de l’humilité, une hauteur de vue, une ouverture d’esprit, de la patience et enfin le sens de l’intérêt national. Cela est indispensable pour aborder les questions de fond qui sont entre autres la question de la libération, sans conditions, des prisonniers politiques y comprit le Président Laurent Gbagbo. Ce n’est même pas un préalable à poser, mais tout simplement une question de bon sens, nécessaire pour entamer toute discussion. Permettez-nous d’insister : Laurent Gbagbo est tout un symbole. Il incarne la soif de liberté du joug colonial du peuple ivoirien. Tant que ce dernier restera emprisonné et écarté des ivoiriens, cela reviendrait à écarter aussi tous ces ivoiriens. Cette étape passée, il faudrait vider le contentieux électoral, pomme de discorde. Car jusqu’à aujourd’hui, nul n’ignore le mystère fait autour des fameux résultats de l’élection présidentielle. Il faut tout simplement y faire la lumière. A partir de là, on peut envisager l’ouverture de négociations franches et sincères avec les forces politiques et sociales significatives du pays sans oublier la France qui doit aussi des explications au peuple ivoirien et ce tout aussi à travers un débat franc et constructif. Les questions de la restauration des acquis démocratiques et du rétablissement d’un Etat de droit doivent être aussi abordées sans détours.
Faire la sourde oreille à tout ce qui vient d’être évoqué, comme cela semble se dessiner actuellement, de la part du régime Ouattara, c’est renforcer le sentiment d’injustice qui fini par produire la rancœur. Or la rancœur débouche sur la haine aveugle. Un aveuglement qui pousse à des choix imprévisibles. Les positions se cristallisent et l’inévitable se produit. Eu égard les enjeux de l’heure, nous nous interrogeons : Ouattara et compagnie seront-ils capables, de faire preuve de dépassement de soi pour la Côte d’Ivoire ? Dans une lettre Ouverte Abou Cissé, oncle maternel de Ouattara, l’oncle nous donne, avec tout le réalisme qu’on lui connaît, un aperçu de ce qu’est réellement son neveu, aujourd’hui à la tête de ce pays: de son entêtement à vouloir museler coûte que coûte ses adversaires politiques, Abou Cissé qualifie cela de « vengeance répétitive ». Il va jusqu’à décrire son neveu comme « un cœur sans âme ». Il lui reproche son manque de lucidité pour « apprécier avec le sens du jugement nécessaire, la situation sociopolitique de la Côte d’Ivoire » et aussi son manque « d’humilité et de bonté ». Puis il s’interroge : « … aujourd’hui, je me pose la question de savoir qui de vous et le Président Laurent Gbagbo est démocrate ? ». Pour finir, il accuse sans ambages Alassane Ouattara d’avoir disloqué et érigé la Côte d’Ivoire en département français. Mais le but recherché, à travers ce courrier, c’est bien d’interpeller Ouattara et ses suiveurs sur leur acharnement à vouloir coûte que coûte juger Gbagbo, sans mesurer le risque de voir les clivages sociaux s’accentuer d’avantage, dans le pays.
De ce qui précède, prenons à témoin tous les ivoiriens et le monde entier : qu’arrive t-il lorsque des autorités, imbus de leur pouvoir méprisent les aspirations de ceux qui ne sont pas de leur bord ? Quand personne ne veut entendre raison ? Les ivoiriens sont devant l’histoire, leur histoire. Le reste du monde les regarde. Il leur appartient à eux et à eux seuls de décider de l’avenir de leur pays. Comme toujours aux grands rendez-vous de l’histoire, il y a un choix à faire. Pour la Côte d’Ivoire, il s’agit du choix de la liberté, de la paix et de la prospérité ou celui de la soumission et de l’anarchie. De toute évidence, il leur revient de faire l’économie des vies en privilégiant le dialogue qui dit-on, est l’arme des forts et non de ceux qui, se faisant appeler ‘’braves’’, font appel aux colons au moindre bruit, incapables de prendre eux-mêmes une quelconque décision courageuse et responsable. La Côte d’Ivoire, ce pays cher aux ivoiriens, mérite mieux que des aventuriers sans aucune culture politique et de sens élevé de l’intérêt du peuple, du peuple ivoirien. Laurent Gbagbo et tous ses collaborateurs doivent être libérés. Le faire, c’est justement faire preuve d’un sens élevé de l’intérêt national, pour un début de solution à cette crise inique que vit la Côte d’Ivoire. Ne pas le faire, c’est maintenir le pays dans une atmosphère délétère et son cortège d’évènements tumultueux et imprévisibles. Chaque ivoirien en est prévenu.
Source: Marc Micael
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