lundi 27 février 2012

Cour Pénale Internationale: Epreuve de vérité


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Le XVIIIe siècle appelé celui des lumières en Europe en général et singulièrement en France a fait la promotion de la liberté mais aussi de l’égalité entre les individus au plan strictement juridique. Cette égalité formelle, bien plus tard, a glissé au niveau des Etats. Ainsi, les institutions de l’organisation des Nations-Unies (ONU) ont été fondées sur ce principe nonobstant quelques exceptions. Les philosophes des lumières de cette époque ont proclamé la séparation des trois pouvoirs dans l’Etat que sont l’exécutif, le législatif et le judiciaire afin d’éviter l’arbitraire, l’injustice et les abus de toutes sortes…

La non intervention dans les affaires intérieures d’autres Etats, souveraineté internationale oblige, a été, l’une des grandes conséquences de l’égalité entre les Etats. Les abus dont des pogromes, ont jalonné l’histoire des nouveaux Etats où la nation a du mal à se former. Des peuples entiers ont été massacrés par leurs gouvernements sans que les institutions internationales comme l’ONU n’aient la possibilité d’intervenir. C’est ainsi entre autres, que le droit humanitaire d’ingérence puis le tribunal pénal international sont nés comme éventuels moyens de solutionner ces injustices et abus. Mais l’homme ne pouvant rien faire sans que son imperfection originelle n’y laisse des traces, on constate un dysfonctionnement dans ce qui paraissait comme un progrès. On se rend compte aujourd’hui, que de plus en plus, l’outil du droit qui devait garantir la justice, la liberté et donc la démocratie, est perturbé par le comportement des Etats prédateurs. D’abord, le tribunal pénal international inculpe en majorité que des Africains, et parmi ceux-ci, seuls les plus faibles sont visés. Ensuite, la compétence universelle que la justice du royaume de Belgique s’est reconnue, est battue en brèche par l’attitude de l’Etat d’Israël et des grandes nations comme la France, les Etats-Unis etc. Avec le problème du leader ivoirien Laurent Gbagbo, la cour pénale internationale installée à La Haye fait face à une difficulté qui va sonner soit le glas de cette cour, soit mettre les supposés grands de ce monde à genou pour que le droit triomphe sur l’arbitraire, que la finance respecte l’être humain, que la force s’apprivoise pour être au service de l’humanité et non au service de quelques crapules.

Une cour pénale internationale (CPI) de justiciables faibles

Les pays qui font du bruit et se veulent donneurs de leçon en démocratie sont les plus réfractaires à la justice internationale. A commencer par les Etats-Unis qui donnent le mauvais exemple, parce qu’ils ne veulent pas voir leurs citoyens mis en cause et inculpés par cette justice-là. Cette incongruité politique, disqualifie les Yankees à se prendre pour les gendarmes du monde libre. Soit les Américains acceptent leur nature humaine donc la possibilité de délinquer comme tout le monde, alors on doit tous reconnaître la valeur de leur démocratie, soit ils la refusent et le monde entier leur retire sa confiance. Le récent exemple des soldats de l’oncle Sam qui ont brûlé le Coran est assez édifiant. Jugés par des musulmans, ces soldats subiraient des peines exemplaires, pour dire qu’il y a des limites qu’il faut se garder de franchir, même dans l’adversité. Les excuses de M. Obama sur la question laissent à désirer… En dehors des Américains qui ont dit non aux statuts de Rome, les autres ont dit oui du bout des lèvres. Sinon comment comprendre que des Milosevic, des Taylor et des Bemba se retrouveraient-ils seuls dans la geôle de la CPI ? Ce ne sont pas les cas de crimes contre l’Humanité qui font défaut dans le monde !

Dans la tragédie du Rwanda par exemple, à en croire tous les rapports, les autorités françaises y sont gravement impliquées. Un homme comme Alain Juppé devrait être jugé au même titre que Laurent Gbagbo. François Mitterrand, Edouard Balladur dans cette même affaire devraient être inculpés. Plus récemment (2004) en Côte d’Ivoire, dans les évènements de l’Hôtel Ivoire, la jaspineuse M-Alliot Marie et son président Chirac (qui pourrait y retrouver très vite la mémoire), devraient tous deux être inculpés pour les tueries occasionnées par les militaires français. Au lieu de cela, jusqu’ici, la cour pénale internationale n’a fait qu’enfoncer des portes ouvertes. Ceux qui sont faibles ou sont affaiblis et dont la condamnation ne saurait dissuader les vrais délinquants politiques, à eux seuls, font les frais de cette justice.


Une justice de lampistes

Quand un homme fort a été affaibli sur le plan international, sa mise en prison lui sert de leçon, mais pas à ceux qui, tapis dans l’ombre, commettent les pires des crimes contre l’humanité. Dans l’affaire de la rébellion ivoirienne, tout le monde montre Guillaume Soro du doigt, comme étant le patron des tueurs. Mais pour une justice responsable, comment peut-on inculper un étudiant qui sort à peine de l’université ? Quelle fortune a-t-il pour lever et armer une troupe forte de plusieurs milliers d’individus ? Ici comme dans d’autres affaires internationales, les vrais coupables sont cachés dans l’ombre et se sont les lampistes qui seront poursuivis. A ce rythme, comment une peine d’emprisonnement peut-elle donner à réfléchir aux tenants des sociétés multinationales, les vrais coupables. Dans cette veine, puisque la chambre préliminaire III de la Cour pénale internationale (CPI) a décidé d’élargir son autorisation d’enquêter sur la situation en Côte d’Ivoire pour inclure les crimes relevant de la compétence de la Cour qui auraient été commis entre le 19 septembre 2002 et le 28 novembre 2010 ; c’est une bonne chose. Cependant, il faut aller au fond des choses et ne pas s’arrêter à mi-chemin. Si tout le monde en Côte d’Ivoire sait que c’est Alassane Ouattara qui a suscité, entretenu et armé la rébellion ; peu de personnes savent que c’est la Société Armajaro qui a financé pour cinquante milliards de francs Cfa, le reste de la note de déstabilisation de la Côte d’Ivoire. Remonter à 2002 sans épingler les dirigeants de ladite société, c’est faire les choses à moitié. Les bras qui ont fait le travail de destruction doivent certes être punis, mais les cerveaux dont les intérêts ont été servis par cette déstabilisation doivent payer autant que les bras. Rendre justice aux victimes ivoiriennes et françaises sans inculper Jacques Chirac, c’est assurer l’impunité pour que prospère plus longtemps, la Françafrique. Remonter à 2002 sans inculper et condamner Nicolas Sarkozy, c’est dévoyer la justice internationale… Dans la vie, il n’est pas interdit d’avoir des amis. Mais quand on a toute la communauté internationale pour amie, comme c’est le cas de M. Alassane Ouattara, on passe pour être trop parfait et trop suspect ; cela s’appelle faire de la corruption à tous les niveaux. Le procureur Ocampo pourra-t-il inculper Messieurs Sarkozy, Obama, Young Jin Choi et Banki-Moon en tant que co-auteurs indirects comme ce fut le cas de M. Laurent Gbagbo ? Idem de M. Alassane Ouattara ? Le cœur humain se satisfait de l’emprisonnement du bras qui a tué, mais la morale internationale exige plus. Il faut que la condamnation frappe la main criminelle d’accord, mais également le cerveau aussi ; lui qui a conçu et planifié le meurtre. A défaut de cette justice-là, on assistera comme d’habitude à une mascarade et une parodie de justice à La Haye. Dans ce cas, la fin du film sonnera très bientôt celle de la CPI pour inefficacité.

Julius Blawa Gueye

Infodabidjan.net

1 commentaire:

  1. Un article très édifiant. Merci monsieur. Continuons à donner ces infos au monde entier et à décrier l'injustice là où elle se présenterait.

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