lundi 25 juillet 2011

Crise socio-politique: Le peuple ivoirien à la croisée des chemins


La guerre absurde imposée aux ivoiriens par Alassane Ouattara et ses maîtres français, n’a pas fait que des morts. Elle a aussi été d’une ampleur telle les ivoiriens en porteront longtemps encore les stigmates. Ce pays où il faisait naguère bon vivre a, semble t-il, fini par perdre de sa superbe, car le peuple ivoirien, ébranlé sur les fondements mêmes qui le distinguait des autres, est devenu de plus en plus méconnaissable. En effet, son hospitalité, sa fierté, son humour légendaire et sa joie de vivre, tendent à disparaître au profit d’un autre type d’ivoirien, partagé entre la révolte et la résignation. Comment donc a-t-on pu en arriver là ? Mais encore, dans quelle mesure la situation de non-droit que vit le pays, si l’on n’y prend garde, pourrait contribuer à exacerber les risques de comportements nouveaux ?

Selon un rapport récent de Freedom House (une ONG qui soutient la démocratie, surveille l'Etat de la liberté dans le monde et les droits de l'Homme) : Sur un classement des 20 pays du monde où les droits de l’Homme et la démocratie sont bafoués, la Côte d’Ivoire occupe la 15ème place. Les ivoiriens ont soufferts et continuent de souffrir, dans leur chair. C’est la triste réalité. Que ceux donc qui veulent démontrer le contraire, cessent de rêver et redescendent de leur nuage. Il y a en Côte d’Ivoire, une situation quasi permanente d’insécurité et un manque de liberté réelle d’expression, jusqu’à ce jour entretenus par mauvaise foi ou par incompétence par le régime tâtonnant d’Alassane Ouattara, qui empêchent le peuple ivoirien de manifester :

Sa joie de vivre

Les ivoiriens ne sortent plus, loin de leurs domiciles, surtout tard dans la nuit. Et si certains le font, c’est souvent la peur au ventre, se dépêchant de rentrer chez eux avant la tombée de la nuit. Cette atmosphère morose plombe pratiquement toutes les activités de divertissements, privant ainsi les ivoiriens d’occasions d’extérioriser leur joie de vivre. Quelques uns tentent l’aventure, mais c’est surtout par simple nostalgie, le cœur n’y étant vraiment plus. Les ivoiriens qu’ont disait être de bons ‘’viveurs’’ et des noceurs, rechignent à reprendre les chemins des boîtes de nuit et autres lieux de distractions, communément appelés ‘’maquis’’. Certains propriétaires de boîtes de nuit ou de ‘’maquis’’, ont vu ainsi leurs clients et leur chiffre d’affaires considérablement chuter. Les salles de spectacles et de concerts qui jadis affichaient, au moindre évènement, salle comble, sont quasiment désertes. Certaines n’ont pas échappées à l’appétit vorace des pilleurs. La plus prestigieuse d’entre elles, le Palais de la Culture d’Abidjan, a été aussi soumise à la furie de ces pilleurs. Les organisateurs de spectacles hésitent encore à relancer leurs activités, de peur de voir leurs investissements ‘’jetés à l’eau’’. Les quartiers ‘’chauds’’ de la ville d’Abidjan et même ceux de l’intérieur du pays ont presque tous perdu leur ambiance d’avant. Cette morosité s’étend aussi au domaine religieux. Rares sont les églises qui projettent actuellement d’organiser des activités d’ordre publics, telles que les veillées ou les campagnes d’évangélisation. Un chrétien témoigne : « Depuis cette crise, une peur bleue s'est emparée des églises protestantes et évangéliques (…) qui n'osent plus mener d'activités sur la place publique. Un bon nombre d'entre elles ont tout bonnement fermé ou, au meilleur des cas, se réunissent très, très discrètement ». Les musulmans quant à eux, restent méfiants et vigilants, à chacun de leurs regroupements, de peur d’être surpris et pris pour cible. L’image de mosquées brûlées est encore vivace dans l’esprit des fidèles. Et un observateur ivoirien d’ajouter : « Depuis le temps du Président Houphouët-Boigny jusqu'à Laurent Gbagbo, jamais pareille chose n'a été observée dans ce beau pays où la liberté de culte a toujours été jalousement préservée ». Le domaine sportif non plus n’est pas en reste. L’équipe nationale, ‘’les éléphants’’, a été contrainte de jouer son dernier match, à l’extérieur du pays. En somme, la Côte d’Ivoire, depuis bientôt 4 mois, n’est plus celle que l’on connaissait. La ‘’plaque tournante’’ du showbiz et de la mode en Afrique de l’ouest est devenue méconnaissable. Ce pays des rythmes musicaux tels que le Zouglou et le Coupé-Décallé a perdu son lustre d’antant. Et les ivoiriens ne sont plus intéressés à l’idée d’aller ‘’chauffer’’ dehors, craignant les FRCI (soldats rebelles d’Alassane) sans foi ni loi qui y règnent en maîtres absolus,.

Son humour légendaire

L’ivoirien est connu pour tourner en dérision tout situation ou évènement quel qu’il soit. Il trouve toujours au travers, soit de la musique, soit de la comédie ou de certaines expressions rendues populaires, l’occasion de montrer son sens de l’humour. Ce pays est d’ailleurs réputé pour avoir révélé des comédiens de talents et de renommé internationale. Zongo et Tao, Adama Dahico, Akissi Delta, Digbeu Cravate…, ne sont plus à présenter. Seulement voilà : ils sont contraints, le temps que dure cet état de fait, de jouer profil bas. Toute allusion ou toute référence tendant à caricaturer ce nouveau régime, trop susceptible, est passible de représailles ou d’emprisonnement ferme. La méfiance des ivoiriens, les uns envers les autres, découle de certains militants trop zélés, qui n’hésitent pas à dénoncer leur concitoyens auprès des rebelles de Ouattara. Certains ivoiriens ont même décidé de s’abstenir de commenter l’actualité politique en publique. Vous avez dit liberté d’expression ? La crise a accentué les clivages entre les communautés et fait perdurer des rancœurs latentes entre elles. La population souffre de l’injustice avérée du pouvoir en place et n’a plus le cœur à plaisanter. Comme quoi, la plaisanterie a aussi ses limites.

Sa fierté

Dans le texte de l’Abidjanaise (hymne nationale de la Côte d’Ivoire), on peut lire cette phrase: « fiers ivoiriens, le pays nous appelle… ». Les ivoiriens étaient si fiers de leur pays qu’ils affirmaient à qui voulait l’entendre : « la Côte d’Ivoire est un pays béni de Dieu ». Cette fierté affichée leur a valu en effet, l’admiration ou la jalousie de leurs frères africains. N’en déplaise aux esprits chagrins. Il suffit de jeter un coup d’œil sur les réalisations et infrastructures, et les potentialités que regorge ce pays pour comprendre que ce ne sont pas juste des paroles en l’air. Seulement, depuis l’arrivée d’Alassane, les ivoiriens ont pratiquement déchanté. Ils constatent avec amertume la triste réalité : leur pays est en train d’être spolié de ses richesses par les puissances étrangères, sans qu’ils ne puissent rien y changer, car vaincus par la puissance de feu de l’armée française. Le café et le cacao continuent de prendre illicitement la direction du Ghana et du Burkina Faso. Au plan économique, ils constatent qu’ils ne sont plus maîtres de leur destin. Les richesses naturelles étant hypothéquées pour l’obtention auprès des occidentaux, de crédits aux montants pharaoniques, par ADO alias ‘’La Solution’’. La Côte d’Ivoire coure ainsi le risque de devenir l’un des pays les plus misérables, hyper endetté. D’autre part, les ivoiriens se sentent pratiquement humiliés car il semble que tout ce qu’ils ont entrepris comme lutte (meetings, mobilisation, rassemblements, discours patriotiques…), au cours de ces 10 dernières années, n’a visiblement pas aboutit aux résultats escomptés. Face à une telle situation, le constat est amère et il n’ya pas de quoi à être fière en ce moment. Selon le politologue Michel Galy, l’ère Ouattara « ramène la Côte d'Ivoire 50 ans en arrière ».

Son hospitalité

Avec un taux record de 26% d’étrangers au sein de sa population, la Côte d’Ivoire demeure l’un des rares pays où les étrangers se sentent comme chez eux et détiennent même l’exclusivité dans certains secteurs d’activités économiques. Les libanais, les burkinabés, les nigérians, les mauritaniens, les ghanéen, les sénégalais, pour ne citer que ceux-là, ont toujours été les bienvenus. Cependant, à la faveur de cette crise les ivoiriens ont constaté que ces personnes qu’ils ont accueilli, se sont ingérées dangereusement dans la vie politique ivoirienne. Les présidents Wade (Sénégal), Blaise Compaoré (Burkina Faso) et Good Luck Jonathan (Nigéria), n’ont-ils pas fustigé Laurent Gbagbo au profit Ouattara Alassane auquel ils ont apporté leur soutien ? L’hospitalité sans pareille des ivoiriens, s’il elle ne l’est déjà, pourrait en être fortement ressentie. La jalousie supposée ou avérée de ces chefs d’Etats de la sous-région s’est ouvertement exprimée lors de cette crise, vu leur parti pris, tout au long de la crise postélectorale. Les répercussions au niveau interne sont visibles : Dans les villages, autochtones et allogènes étrangers se regardent désormais en chien de faïence. Conséquence, les ivoiriens admettent avoir été victimes de leur hospitalité et ne comptent plus commettre les mêmes erreurs à l’avenir.



Comme on peut le constater, des changements très profonds sont en train de s’opérer au sein du peuple ivoirien. Les choses ne seront certainement plus comme avant. C’est un véritable baptême du feu que les ivoiriens sont en train de vivre. Baptême duquel ils sortiront irrémédiablement transformés, tout an ayant tiré les leçons du passé. Restera donc à savoir si cette épreuve leur permettra d’amorcer la véritable lutte pour leur liberté et leur dignité ou au contraire s’ils abdiquent, préférant se soumettre à leur sort actuel. Seul l’avenir seul nous le dira.



Marc Micaël

Source : pourunecotedivoiresouverraine

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire