mardi 25 octobre 2011

Ouattara ferme les camps de déplacés de Duékoué, les humanitaires menacés

Getty Images
Les déplacés de guerre de Duékoué estimés à 13 000 âmes, retranchés dans plusieurs camps dont le principal est celui de l’église catholique de la ville, seront expulsés et jetés et jetés à la belle étoile. Au plus tard dans la première semaine du mois de nombre qui pointe déjà. Le gouvernement, qui en a décidé ainsi, vient en effet d’ordonner aux organisations internationales d’assistance aux réfugiés déplacés de guerre établis à Duékoué la fermeture de tous les camps.

A travers un courrier signé du ministre à la Défense, Paul Koffi Koffi adressé à l’Organisation internationale des migrations (Oim), Afrique secours assistance (Asa) et autres structures humanitaires qui assistent jusque là les populations en détresse de la région. Cette décision du gouvernement viole, selon des responsables d’organisations de secours humanitaires, les dispositions internationales qui stipulent qu’on ne doit pas forcer le déplacé ou réfugié à regagner son lieu habituel de résidence où il estime que sa sécurité n’est pas garantie. Au lieu de les rassurer donc, le gouvernement qui se fonde sur des a priori qui conduisent à assimiler les déplacés à des «miliciens pro-Gbagbo» prend le risque de jeter à la belle étoile et sans aucune forme d’assistance ces populations dans l’ensemble sans toit pour s’abriter. Et sans ressources pour se nourrir ; leurs villages et habitations dans la ville de Duékoué ayant été incendiés, saccagés et pillés au cours des attaques meurtrières dont ils ont été victimes au cours de la crise postélectorale. Dans la ville de Duekoué, il suffit d’un petit tour au quartier guéré, à Blody, Toa-Zoé, etc. pour se rendre qu’il n’existe plus sur place d’habitations pouvant accueillir les populations contraintes de trouver refuge dans les camps de déplacés.


A ce jour, l’Etat n’a absolument rien fait – il faut le souligner – pour assister ces populations et favoriser leur retour dans leurs foyers. Six mois après l’accession d’Alassane Ouattara au pouvoir, à l’issue de l’offensive des Frci qui a fait plus de 1000 morts à Duekoué, la sécurité reste volatile dans la région et des plantations sont encore occupées par les dozos et allochtones en armes dans la plupart des villages.

Des représailles contre les déplacés

Outre le camp de déplacés de la mission catholique, le plus grand tenu par l’OIM, il y a le site de Nohibly, qui s’étend sur une superficie de 24 ha, dans le voisinage de la résidence du ministre Adama Toungara à Duékoué où le chef de l’Etat Alassane Ouattara est censé prendre ses quartiers lors de sa visite prochaine dans la région. Pour des observateurs, le ministre Paul Koffi Koffi qui avait récemment exigé des organisations humanitaires la liste des pensionnaires des différents camps qui abriteraient des déplacés de guerre a agi en guise de représailles. L’enjeu, c’est de mettre hors d’état de nuire ces «pro-Gbagbo» qui ont osé huer et lapider récemment les quatre ministres de la République qui avaient effectué le déplacement de la mission catholique de la ville juste pour leur demander de réserver un accueil chaleureux au nouveau chef de l’Etat. Dans l’entendement du ministre qui reproche aux humanitaires de ne pas se plier à ses injonctions, ces supposés miliciens pro-Gbagbo – hommes, femmes et enfants – constituent une menace. D’où le choix de les disperser, en dépit des risques humanitaires que cela comporte. L’expulsion des déplacés de Duekoué consacre la démission totale du gouvernement qui catégorise les Ivoiriens, selon qu’elles sont de tel ou tel bord politique et méritent ou pas la protection de l’Etat. On se demande aujourd’hui ce qu’il adviendra des populations sans logis ni repère qui font l’objet de cette décision inique du gouvernement.

Source: Edouard Amichia – Le Nouveau Courrier

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