jeudi 3 novembre 2011

Guerre ouverte contre les déplacés de guerre: L’attitude du régime Ouattara indigne les humanitaires

Agences onusiennes et ONG réprouvent désormais publiquement le projet de fermer manumilitari, et sans la moindre mesure d’accompagnement, les camps de réfugiés dans l’Ouest du pays.

Depuis de nombreuses éditions, Le Nouveau Courrier alerte l’opinion publique sur un projet scandaleux du régime Ouattara. Fermer de manière autoritaire les camps dedéplacés, notamment à Duékoué, pour «punir» des personnes qui ont tout perdu, mais qui ont le mauvais goût d’être «pro-Gbagbo» au point de huer un quatuor de ministres pro-Ouattara venus préparer la tournée de l’actuel chef de l’Etat dans l’Ouest du pays. Désormais, les agences des Nations unies et les ONG prennent le relais.

De manière diplomatique, elles manifestent leur désapprobation au régime Ouattara. «Les agences des Nations Unies et les organisations non gouvernementales (ONG) exhortent le gouvernement ivoirien à réexaminer la fermeture prévue des camps de déplacés à l’ouest du pays en vue de les forcer à rentrer chez eux», écrit ainsi l’agence Irin, proche des onusiens. Irin donne la parole à une des PDI (Personnes déplacées à l’intérieur de leur pays) concernées, Fabrice Bah, de Duékoué. «Des pressions commencent à s’exercer sur les personnes déplacées [pour qu’elles partent], ce qui, selon nous, est inacceptable (…) Ils nous avaient promis qu’ils reconstruiraient au moins les maisons détruites avant de nous forcer à partir», rappelle-t-il, ajoutant que si on les force, les déplacés partiront.

Mais s’en iront au Liberia et non dans leurs villages. «La situation actuelle ne présage rien de bon pour pouvoir établir de bonnes relations avec les hommes armés», explique le déplacé. La communauté des humanitaires montre déjà les couleurs. Le gouvernement doit accélérer la reconstruction afin de faciliter les retours, a ainsi indiqué Bernadette Kouamé, responsable de la communication du HCR (Agence des Nations unies pour les déplacés). Il est nécessaire que le gouvernement reconnaisse la légitimité de ces peurs, a indiqué Gaëlle Bausson, porte-parole de l’ONG Oxfam.

Un gouvernement qui considère les déplacés comme des ennemis et non des compatriotes

Les humanitaires sont formels. Au lieu de procéder de manière autoritaire, les autorités ivoiriennes doivent clarifier, selon OCHA, «les raisons pour lesquelles certaines personnes déplacées montrent tant de réticence à retourner chez elles». En effet, les déplacés expriment des craintes très claires : ils redoutent la rencontre avec ceux qui se sont accaparés leurs terres, craignent des tensions intercommunautaires, et ont peur de la violence orientée des FRCI. Ce à quoi le ministre délégué à la Défense, Paul Koffi Koffi, a répondu en disant, lors d’un séjour à Taï, que ceux qui n’aiment pas les FRCI doivent aller vivre dans un autre pays. OCHA demande également au gouvernement de «trouver des solutions de réinstallation plus viables» pour certains déplacés.

De son côté, OXFAM insiste sur le fait qu’il faut commencer par réinstaller les personnes qui souhaitent rentrer chez elles en priorité. Et leur attribuer un kit d’assistance de base : de l’argent pour financer leur déplacement, des produits alimentaires et non alimentaires, des semaines, et du «matériel de base pour l’eau et l’hygiène». Lorsque le gouvernement planifie des retours, il devrait commencer par les personnes qui souhaitent rentrer chez elles, a dit Mme Bausson d’Oxfam. Les personnes qui sont prêtes à rentrer chez elles ou à se réinstaller et qui en sont capables, devraient recevoir un kit d’assistance de base, comprenant de l’argent pour payer leur déplacement, des produits alimentaires et des produits non alimentaires, des graines à semer, ainsi que du matériel de base pour l’eau et l’hygiène, a-t-elle ajouté. Les déplacés ivoiriens, qui sont toujours sous la menace d’un gouvernement qui les considère non comme des compatriotes mais comme des ennemis, peuvent se satisfaire désormais de voir que la communauté des humanitaires s’est saisie de leur cause. Même si l’épée de Damoclès du régime Ouattara est toujours au-dessus de leurs têtes.

Philippe Brou

Source: Le Nouveau Courrier

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