mardi 10 janvier 2012

Affaire Kieffer : à Yaokro, « village du squelette », les FRCI intimident les populations

Yaokro, une bourgade d’une centaine d’habitants essentiellement composés de Baoulé et de ressortissants béninois (à qui se sont ajoutés ces dernières années des Dioula et Burkinabé) a vu son quotidien basculer subitement, avec la mystérieuse découverte du squelette le plus célèbre de la décennie, celui supposé de Guy André Kieffer.
Dans ce village, allogènes béninois et allochtones baoulé sont surpris de cette «banale» affaire de restes humains, qui a pris subitement des allures d’affaire d’Etat. Le jeune Kouamé, gérant de cabine, ne cache pas sa gêne et sa stupéfaction devant cette affaire. «Mais personnellement, nous sommes surpris. Sinon ce corps-là, celui qui a été exhumé, a été enterré je crois en 2004 ou 2005 devant tout le monde. C’est-à-dire devant l’ex-commandant de brigade de Saïoua et ses éléments qui avaient fait le constat d’usage en son temps, devant les chefferies bété de Zéga, baoulé et béninoise de Yaokro. Le sous-préfet lui-même était présent. En tout cas, cela ne s’est pas fait en cachette. Aujourd’hui, les gens viennent exhumer les restes de ce corps et nous apprenons autre chose. Franchement, le corps en question n’avait pas l’allure d’une personne de race blanche à l’époque. Si les choses ont changé, c’est autre chose», nous confie-t-il discrètement. Avant de nous faire savoir que le village a reçu ordre de ne parler à quiconque concernant cette affaire. Des consignes ont été formellement données en ce sens : toute personne qui souhaiterait avoir des informations devrait être orientée chez le chef du village.
«Ce sont les Blancs qui ont la technologie, mais ils ne peuvent pas nous tromper»

Pendant que nous échangions discrètement, une femme s’approche de nous et échange en langue baoulé avec le jeune. Avant de nous interroger : «Cette affaire-là est si sérieuse ?» Nous tentons de lui expliquer qui était Guy André Kieffer. Elle tombe des nues. «Franchement, le corps qui avait été enterré sur les bords de la rivière n’avait rien d’un Blanc. C’est parce que le commandant de gendarmerie de l’époque (de Saïoua dont dépend Yaokro, ndlr) est décédé et en plus, les archives avec la crise-là ont dû être saccagées. Sinon tout était à la gendarmerie. Ici, nous-mêmes avons été surpris quand on a appris que les restes qu’ils sont venus prendre là appartenaient à un Blanc. Bon, ce sont eux qui ont la technologie, ils savent comment ils ont su. Mais ils ne peuvent pas nous tromper. A moins que ce Kieffer là soit d’origine noire», explique-elle. Avant de nous avertir que les villageois ont peur de parler de cette affaire, depuis que des éléments des Frci surveillent le village et surtout la rivière Gorée, là où un squelette humain aurait été exhumé.

En tout cas, une ambiance lourde pèse désormais sur le gros campement de Yaokro. Allou Kouamé, chef du village de Yaokro que nous avons vu furtivement de passage sur sa moto, a laissé entendre qu’il ne savait pas grand chose de cette histoire. «Un corps qui avait été enterré ici, il y a plusieurs années, ce sont ces restes que les gens sont venus chercher. Ils disent qu’ils avaient des informations sur son identité. Ils sont venus avec les Frci, ce sont les Dahomey (Béninois, ndlr) qui les ont aidés à déterrer le corps (les restes humains, ndlr). Nous n’avons rien à voir avec cette affaire. Et moi je suis serein. Quand on me demande, je dis ce que je sais, c’est tout », lâche-t-il, avant de nous inviter chez lui pour plus d’informations. Puisque sa notabilité l’y attend déjà.

Le chef du commando FRCI au chef baoulé : «Dites aux gens de ne pas parler aux journalistes»

Quelques minutes après la brève entrevue avec le chef du village et dans le souci d’en savoir davantage, notamment sur le fameux témoin qui aurait conduit les hommes de Ramaël à ce mystérieux squelette, nous nous aventurons vers le domicile du chef. Grande est notre surprise de constater que son domicile est désormais gardé par des éléments Frci, armes au poing. Nous prenons le risque d’arriver quand même sur les lieux. A peine nous a-t-on fait asseoir que nous entendons le chef du commando Frci dire au chef du village qu’ils sont là parce qu’on leur a fait savoir que des journalistes allaient venir les interroger.

«Dites aux gens de ne parler à personne, surtout si quelqu’un se présente et vous dit qu’il est journaliste. Il faut qu’il ait la permission du commandant à Issia d’abord», fait-il savoir au chef du village. Le message est assez clair, les journalistes à la recherche d’informations doivent avoir un sésame du commandant des Frci d’Issia avant de faire leur travail. Nous prétextons discrètement un besoin de recharger nos crédits téléphoniques pour nous soustraire de cette ambiance morose, surtout que Le Nouveau Courrier est le journal qui a fait précipiter le scénario du probable squelette de Guy André Kieffer retrouvé à 400 km d’Abidjan.

Gérard Koné, envoyé spécial à Zéga et à Yaokro

Source: Le Nouveau Courrier/Infodabidjan

1 commentaire:

  1. nous sommes vraiment surpris et heureux du travail qu'abat nos journalistes ,rappelons à nos frères que seule leur détermination à faire leur travail dans un respect de la vérité pourra nous aider à croire à que nous finirons par faire triompher la vérité ,et de la victoire du peuple ivoirien sur le mensonge de mr DRAMANE et ses acolytes ,Dieu bénisse nos malfaiteurs ...

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