vendredi 18 mars 2011

A quoi servent les conseillers de Blaise Compaoré?


A quoi servent les conseillers de Blaise Compaoré?

Et si Blaise Compaoré s’adressait particulièrement à son peuple pour amorcer la baisse des tensions?
Depuis plusieurs semaines, le Burkina traverse une grave tourmente sociale qui fait désormais planer un voile opaque d’incertitude sur l’école nationale et sur l’avenir des élèves et étudiants. La fermeture des universités publiques, qui vient s’ajouter à celles des établissements d’enseignement primaire et secondaire en vigueur depuis plusieurs semaines, témoigne fortement de ce que l’heure est grave. Mais plus encore, on est en droit de s’étrangler d’inquiétude quant à l’issue de cette crise aux proportions définitivement nationales, dans un contexte international marqué par la montée des tensions sociales, de l’expression des libertés et du refus de l’oppression.

Alors que la crise sévissait depuis le 20 février dernier, et que les manifestations d’élèves, entamées dès le mardi 22 février à Koudougou, troisième ville du Burkina Faso, où un scolaire, Justin Zongo, a trouvé la mort dans des circonstances troubles, c’est seulement le 13 mars que le président du Faso, Blaise Compaoré, est sorti de sa réserve. Sans doute pensait-on, dans l’entourage du chef de l’Etat burkinabè, que le «feu» sera bien vite circonscrit et qu’au sortir de la 22e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), les choses rentreraient dans l’ordre.

D’autant que le gouvernement a tout de même pris quelques bonnes mesures pour aller dans le sens de l’apaisement, dont notamment le limogeage du gouverneur de la région du Centre-Ouest et du commissaire central de police de Koudougou. Seulement, entretemps, les manifestations se sont poursuivies, avec des commissariats saccagés et autres destructions de biens publics. En déplorant récemment le décès de Justin Zongo, Blaise Compaoré a tenu à rassurer les uns et les autres sur le fait que «les manifestations dans un Etat de droit sont tout à fait légitimes et normales». Cependant, a-t-il aussi réaffirmé, et cela tombe sous le sens, «les destructions et les actes de vandalisme observés ça et là qui touchent à la fois des édifices publics qui n’appartiennent pas à un gouvernement» sont inadmissibles.
On peut saluer la prise de parole du chef de l’Etat sur cette grave situation, même si elle vient sur le tard. On peut, dans le même temps, déplorer que cette parole présidentielle, sur un fait qui n’en finit pas de mettre le pays sens dessus-dessous, ne prenne pas une dimension quelque peu solennelle. Le geste mortel de Mohamed Bouazizi, en Tunisie, dépité par une tourmente policière, est toujours frais dans les mémoires. De ce point de vue, le président aurait dû réagir plus promptement à la mort de Justin Zongo et là-dessus, au-delà de sa personne, ses conseillers en stratégies diverses auraient pu, auraient dû l’amener à sortir de sa légendaire torpeur.

Autrement, plus que le président, ses conseillers n’ont de raison d’être que celle de faire valoir leur capacité à anticiper sur certains événements en ayant la meilleure oreille sur l’évaluation situationnelle du pays à tout instant, sans l’isoler du contexte géopolitique sous-régional, régional et international. Sans doute que là aussi, les responsabilités devront être situées, mais tout de même, plutôt que d’enfermer le président dans une tour d’ivoire et d’essayer de «gérer» à leur manière et dans leurs cercles ce qu’ils pourraient considérer comme des sautes d’humeur vite maîtrisables, le rôle des conseillers n’est-il pas d’éclairer le président au mieux de leurs compétences? Cela induit l’obligation, le devoir de vérité, en lui exposant franchement, que cela lui plaise ou non, tous les éléments d'appréciation, pour l'aider à prendre les bonnes décisions dans l'intérêt du pays. Ils doivent donc attirer, en toutes circonstances, sa présidentielle attention sur les dangers qui s’annoncent ici et là, sur les malaises multiformes qui traversent les différentes couches de la société.
Les conseillers ont-ils fait correctement leur travail dans ce dossier pour qu’on en soit encore là, en pleine inquiétude, presqu’un mois après ces tristes événements, et à redouter que la rue gronde de tous ses malaises? Il n’est peut-être pas trop tard pour remettre un peu plus de sérénité dans le débat. Les peuples adorent des signaux forts, les actes solennels. Et si Blaise Compaoré s’adressait enfin particulièrement à son  peuple, à la nation pour amorcer la baisse des tensions?

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