mardi 6 décembre 2011

DEPORTATION DE LAURENT GBAGBO A LA CPI, LEGISLATIVES 2011 EN COTE D’IVOIRE : QUEL LIEN ?


Le 11 décembre 2011, le pouvoir Ouattara organisera les élections législatives en Côte d’Ivoire pour élire un nouveau parlement dans l’optique de mettre en place le deuxième pilier de la république: l’Assemblé nationale.
Le 29 novembre 2011, soit deux (2) semaines avant ses élections, le Président Laurent GBAGBO est déporté à la cour pénale internationale (CPI) et selon l’acte d’accusation :
« Laurent Gbagbo aurait engagé sa responsabilité pénale individuelle, en tant que coauteur indirect, pour quatre chefs de crimes contre l’humanité à raison de meurtres, de viols et d’autres violences sexuelles, d’actes de persécution et d’autres actes inhumains, qui auraient été perpétrés dans le contexte des violences post électorales survenues sur le territoire de la Côte d’Ivoire entre le 16 décembre 2010 et le 12 avril 2011. ».
Le même acte indique :

« Les forces pro-Gbagbo ont attaqué la population civile à Abidjan et dans l’ouest du pays, à partir du28 novembre 2010, prenant pour cible des civils qu’elles pensaient être des partisans du candidat de l’opposition, Alassane Ouattara. »

Pour rappel, le président Laurent GBAGBO, lors de l’élection présidentielle de 2010, a eu le soutien sans faille de la région d’Abidjan et de l’ouest. Dans le district d’Abidjan, Laurent GBAGBO a obtenue au premier tour 46.88% contre 31.37% pour M. OUATTARA. En termes simples, sur trois (3) civils dans la rue, deux (2) sont probablement des partisans du Président Laurent GBAGBO et un (1) est probablement un partisan de M. OUATTARA. De même, dans l’ouest du pays c’est-à dire, dans les 18 montagnes et le moyen Cavally, le Président Laurent GBAGBO a eu respectivement 40.15% et 53.26% contre respectivement 15% et 17.35% pour M. OUATTARA c’est-à-dire, pour quatre (4) civils dans la rue, trois (3) sont probablement des partisans du Président Laurent GBAGBO et un (1) est probablement partisan de M. OUATTARA. Au vue de ces chiffres, comment peut-on admettre que le Président GBAGBO puisse concevoir un « plan » pour commettre des « meurtres », des « viols », des actes de « persécutions » et des « actes inhumains » sur ces propres électeurs?

Le fait que Laurent GBAGBO ait été embarqué à Korhogo sans M. Fofié Kouakou Martin, qui était présent sur le lieu d’embarquement et est sanctionné par le conseil de sécurité de l’ONU depuis 2006 pour la mise à mort de 99 personnes , sans M. OUATTARA, auteur du génocide wè par son ordonnance du 17 mars 2010 faisant de lui, le chef hiérarchique des rebelles qui ont exterminé 800 personnes de même ethnie et sans M. SORO chef de la rébellion dont les faits et méfaits peuplent tous les rapports de l’ONU depuis 2002, montre le niveau de sérieux qu’il faut accorder à la CPI et aux raisons avancées pour justifier la déportation du Président Laurent GBAGBO. Peut-être qu’un article caché du statut de Rome instituant la CPI connu par les initiés de cette cour stipule :

« Tout auteur, coauteur de crimes contre l’humanité, crimes de guerre, viols et actes inhumains, parrainé par l’occident jouit d’une immunité internationale »

Seul l’enjeu des élections législatives peut justifier cette précipitation.

En effet, le caractère illégal et non démocratique de la conquête du pouvoir exécutif par M. OUATTARA constitue la grande faiblesse du régime actuel. Suite à la victoire du président Gbagbo proclamée par le Conseil Constitutionnel de la Côte d’Ivoire à l’issu du deuxième tour des élections présidentielles, M. Ouattara refuse de reconnaitre cette victoire. La France, au mépris de la Constitution ivoirienne et croyant encore la Cote d’Ivoire sous le code de l’indigénat de l’époque coloniale qui donnait droit au Président Français de choisir les gouverneurs de ses colonies, a organisé un coup d’Etat pour installer à la tête du pays son candidat vaincu par le vote des ivoiriens.

Ces élections législatives visent donc à transformer la défaite du candidat OUATTARA aux élections présidentielles par une victoire dans les urnes via le Parlement pour donner un visage démocratique à ce pouvoir ethnique et génocidaire mis en place depuis le 11 avril 2011 qui extermine peu à peu les ivoiriens par des exécutions sommaires (26 exécutions en un mois selon l’ONU).

Le découpage électoral qui en est l’un des instruments, est l’objet de notre analyse.

Contrairement au consensus recherché autour des questions électorales depuis le coup d’Etat de 1999, le nouveau découpage électoral a été fait par M. Ouattara d’une manière unilatérale.

L’objectif stratégique recherché, en violant sans inquiétude le consensus pour un régime qui prétend réconcilier les ivoiriens, est de réaliser une écrasante majorité parlementaire par la fabrication d’un surnombre d’élus dans les zones favorables à M. Ouattara puis en écartant l’opposition remplacée par des indépendants sans électeurs (car la plupart des électeurs sont des déplacés internes ou des réfugiés externes et les autres restés sur place ne participeront pas au vote compte tenu des conditions de sécurité et de détention de leurs leaders) et enfin, en affaiblissant le PDCI, dans son bastion du centre du pays.



FABRIQUER UN SURNOMBRE D’ELUS DANS LES ZONES FAVORABLES AU RDR.

La carte électorale des élections du premier tour donnant les zones d’influence des différents poids lourds à l’élection présidentielle de 2010 indiquent clairement que le candidat du RDR venait en tête du classement dans cinq (5) régions dont quatre (4) du nord et un (1) du centre: la région des savanes, le Worodougou, le Bafing, le Denguélé et la vallée du Bandama. Les cinq (5) régions, zones d’influence du candidat Ouattara sont passées à onze (11) régions dont dix (10) du nord dans le nouveau découpage régional correspondant aux zones de règne des différents chefs de guerre de la rébellion. Sur treize (13) nouvelles régions créées, six (6) se trouvent donc au nord.

Les cinq (5) régions favorables à M. OUATTARA sont passées de (53) sièges dans l’ancien découpage à (74) sièges dans les onze (11) régions favorables à M. OUATTARA selon le nouveau découpage soit une augmentation de vingt et un (21) sièges. M. OUATTARA commence les élections avec une avance nette de 74 sièges, soit 30% des sièges pour 17% de la population électorale.

Dans le Bafing l’une des régions d’influence de M. OUATTARA, pour une population électorale de 38 766, il est prévu 5 sièges de députés, soit 1 député pour 7 000 électeurs, contre 1 député pour 26 000 électeurs dans la région du fromager et 1 député pour 55 000 électeurs à Abidjan, pour une moyenne nationale de 1 député pour 22 453 électeurs. En terme simple 1 électeur du Bafing vaut presque 4 électeurs de la région du fromager et presque 8 électeurs à Abidjan. Le principe démocratique (1 homme une voix) devient : 4 hommes une voix dans l’ouest et 8 hommes une voix dans le sud. Le département de Korhogo (10 sièges) a presque 2 fois plus de sièges que les départements suivants de même importance ou souvent plus grands: Yopougon (6 sièges), San-Pedro (5 sièges), Gagnoa (5 sièges), Daloa (6 sièges), Man (4 sièges).

Le département d’Odienné (5 sièges) a plus de sièges que des départements plus importants comme Abengourou (3 sièges), Adzopé (3 sièges), Sassandra (2 sièges), Yamoussoukro (3 sièges).

Les cinq (5) régions favorables à M. Ouattara selon l’ancien découpage totalisent une population électorale de 976 409 électeurs soit 17% du collège électoral national. Avec le nouveau découpage électoral, ses régions auront 74 sièges de députés, soit 30% des sièges du Parlement. Abidjan qui totalise 30% de l’électorat a 12% des sièges. En terme simple, pour deux fois plus de population électorale à Abidjan par rapport aux régions favorables à M. Ouattara, il y a deux fois moins d’élus. Le RDR commence, ainsi, la course avec une avance nette de 74 députés. La combinaison des critères de superficie et de population ne justifient pas cette inflation des élus dans les zones d’influence de M. OUATTARA.




ECARTER LE PRESIDENT GBAGBO POUR ECARTER L’OPPOSITION

Le candidat de La Majorité Présidentielle (LMP), Le Président Laurent GBAGBO, était en tête au premier tour des élections dans dix (10) régions qui sont : Agnebi, Lagunes, Marahoué, Sud-Comoé, Moyen-Comoé, Fromager, Zanzan, 18 montagnes, le Haut Sassandra, Sud-Bandama. Ces dix régions représentent 3 766 534 électeurs (4 fois plus d’électeurs que dans les zones pro-OUATTARA) soit 66% du collège électoral national correspondant approximativement à 2/3 de la population électorale nationale. Ces régions totalisent 147 sièges soit 57% des sièges. Les 2/3 de la population électorale favorable au Président GBAGBO ont un peu plus de la moitié des sièges. Cela montre que M. OUATTARA a intérêt à écarter les candidats LMP aux législatives s’il veut contrôler le parlement.

Au deuxième tour de l’élection présidentielle, si nous prenons uniquement en compte les 14 régions dont les résultats ont fait l’objet de consensus au niveau de la commission électorale indépendante (CEI) sur les 19 régions que comptait la Cote d’Ivoire, le résultat global du deuxième tour de l’élection présidentielle pour les 14 régions est de 53.87% pour Laurent GBAGBO et 46.13% pour M. Ouattara soutenu par M. BEDIE. Ces résultats consolidés ont confirmé le soutien inconditionnel des dix (10) régions du premier tour au candidat GBAGBO sur le candidat OUATTARA.

Ces chiffres démontrent avec éloquence que si le découpage était équitable et consensuel et si les conditions de sécurité étaient garanties et que la neutralité de la commission électorale indépendante (CEI) était avérée, les chances du pouvoir OUATTARA de se donner une légitimité démocratique par le biais du Parlement seraient très minces et sa prétendue victoire a l’élection présidentielle suspecte. Priver les 2/3 de l’électorat de leur citoyenneté par l’emprisonnement, l’exil de ses candidats potentiels et de ses électeurs; fermer la porte à tout consensus sur le découpage électoral, la composition de la CEI, les conditions de sécurité, sont l’unique chance pour le pouvoir de justifier sa victoire à l’élection présidentielle et s’offrir une majorité pour se donner une façade démocratique.

Ecarter l’opposition d’une manière ou d’une autre, permettra donc de fabriquer des vainqueurs et des vaincus à souhait comme ce fut le cas dans la région nord du pays occupée par les rebelles lors de l’élection présidentielle. C’est donc au prix de l’exclusion de l’opposition, que le pouvoir Ouattara pourra remporter les circonscriptions des zones favorables à cette opposition ; l’ONUCI, la LICORNE et les FRCI veillant au grain pour sécuriser les fraudes et déporter les inattendus, ou pire bombarder ceux qui revendiqueraient un quelconque recomptage ; l’ONUCI se tenant prête pour certifier la mascarade selon son nouveau chef.



AFFAIBLIR LE PDCI DANS SON BASTION.

Principale force politique concurrente du RDR au sein du RHDP, M. Ouattara a promis le poste de Premier ministre au PDCI-RDA. En politique, les promesses n’engagent que ceux qui y croient selon une personnalité de la droite française; les rapports de force, les intérêts et les convictions profondes décident en dernier ressort. Les exigences sécuritaires ayant justifié le maintien de M. SORO Guillaume au poste de Premier ministre n’ayant pas changé, il est fort probable que la promesse faite au PDCI n’engage que ceux qui y ont cru. Pour avoir les mains libres de décider, M. Ouattara a intérêt à réduire le PDCI à une minorité invisible à l’Assemblée nationale, lui enlevant ainsi toute prétention à un chantage ou une pression politique.

Lors du premier tour de l’élection présidentielle, le candidat du PDCI, M. Aimé Henri KONAN BEDIE est arrivé en tête des élections dans trois (3) régions : la région du lac, le Nzi-Comoé, le Bas-Sassandra. Dans le V Baoulé qui est sans conteste la zone d’influence du Président BEDIE, sur 378 312 électeurs, il est prévu 19 sièges de député soit 1 député pour 16 000 électeurs contre 1 député pour 7000 électeurs dans le Bafing, bastion de M. Ouattara.

Pour les 3 régions favorables au Président BEDIE, le collège électoral est de 806 014 électeurs soit 14% de l’électorat avec seulement 34 sièges soit 13% des sièges. La zone d’influence du Président BEDIE possède deux fois moins de sièges que la zone d’influence de M. OUATTARA pour à peu près la même population électorale. Pour faire passer cette pilule amère, une concession de taille a été faite au Président BEDIE. En effet une région spéciale a été créée sur mesure pour le Président BEDIE : la région d’IFFOU avec comme capitale DAOUKRO dont le département bénéficie de 3 sièges devançant ainsi de grands départements comme Bongouanou (2 sièges), Agnibilékro (2 sièges), Sassandra (2 sièges), et un nombre de sièges identiques avec d’autres grands départements comme Adzopé (3 sièges), Aboisso (3 sièges), Bouaflé (3 sièges), Yamoussoukro (3 sièges), Abengourou (3 sièges).

CONCLUSION

Selon la carte politique de la Côte d’Ivoire telle qu’elle se présente aux yeux de l’observateur au vu des résultats du premier tour de l’élection présidentielle de 2010 et des résultats consensuels du second tour, le poids politique du Président GBAGBO et son assise nationale ne souffrent d’aucun doute : dix (10) régions sur 19 concentrant 66% des électeurs lui sont acquises. Il est véritablement le premier de la classe politique ivoirienne. Vouloir faire des élections démocratiques en écartant un tel leader, ses partisans contraint à l’exil interne et externe, c’est refuser la voie de la démocratie et emprunter la voie de l’usurpation politique pour installer une chambre d’enregistrement de la politique de recolonisation du pays. Le risque de compromettre la réconciliation et éloigner la Côte d’Ivoire de la démocratie et de l’Etat de droit est élevé.

Hier, Monsieur Dramane Ouattara, animé d’une conception très sarkozienne de la démocratie (le pouvoir des bombes par les bombes et pour les bombes) faisait bombarder des Ivoiriens à Abidjan par l’armée française pour installer la « démocratie » pendant qu’il donnait l’ordre d’exterminer prêt de 800 citoyens de l’ethnie wè, brûler des villages et tuer d’autres dans une église à SAN-PEDRO pour s’ériger en Chef de l’Etat.

Aujourd’hui, depuis son accession au pouvoir, il se réjouit de l’occupation illégale par ses rebelles des domiciles et des plantations, de la déportation, de l’exil et de l’exécution au quotidien des ivoiriens qu’il est censé protéger et pour qui il cherchait le pouvoir.

Dans sa conception très exceptionnelle de la démocratie, il est entrain de se fabriquer une majorité à l’Assemblée nationale pour priver l’Assemblée nationale de tout débat démocratique et passer à l’offensive sociale contre les étudiants, les travailleurs et les propriétaires coutumiers de terre agricole.

L’organisation de la marginalisation du PDCI et le triomphe sans gloire du RDR dans le Parlement à venir avant même le déroulement des élections par la manipulation du découpage électoral, finit par convaincre tout observateur attentif du peu d’intérêt de M. Ouattara pour la démocratie et sa peur bleue de toute compétition politique ouverte en Côte d’Ivoire. Ce sont les militants du PDCI et des autres partis du RHDP qui apprendront que nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude.

DON MELLO Ahoua


Docteur Ingénieur des Ponts et Chaussées

Ministre et Porte Parole du Gouvernement

AKE NGBO

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